Lorsqu’on débarque à Séoul pour la première fois, on croit d’abord, à juste titre, débarquer en Corée du Sud. Et puis, au fur et à mesure qu’on s’imprègne du pays, quelque chose vient vous étonner. Quelque chose qu’on commence par simplement suspecter, sans vraiment s’en rendre compte, puis qu’on ressent de plus et plus et qui finit par vous frapper comme une évidence.
Au pays du matin calme, rien ne semble être moins important que la Corée du Sud. Ici, on parle bien plus volontiers de Corée, tout court.
Un lieu illustre mieux qu’ailleurs les paradoxes de ce pays comme séparé en deux malgré lui : la zone démilitarisée, ou « DMZ ».
Le dernier vestige de la Guerre Froide
Sous occupation japonaise du début du vingtième siècle jusqu’à la fin de la Seconde Guerre mondiale, le pays connaît une nouvelle forme d’occupation provisoire à partir de 1945. La Corée est divisée en deux régions distinctes autour du 38e parallèle, occupée au sud par les forces américaines et au nord par les forces soviétiques.
Sur fond de guerre froide, les tensions s’accroissent et aboutissent en 1950 au début de la guerre de Corée, qui s’achèvera par la signature d’un armistice en 1953 entre la Chine, la Corée du Nord et les Nations Unies. La Corée du Sud ne signera pas le cessez-le-feu, ce qui fait que techniquement, les deux Corées sont aujourd’hui toujours en guerre.
Outre la séparation franche des deux zones du nord et du sud, le traité de paix actera également la création d’un secteur tampon d’environ 4km de large : la DMZ. L’un des derniers no man’s land de la planète.
Premier aperçu, le parc Imjin Gak
Aujourd’hui, depuis la Corée du Sud et Séoul en particulier, plusieurs tours permettent de rejoindre la DMZ où, tout en restant à distance raisonnable de la frontière, il est possible de ressentir au plus près les conséquences, toujours d’actualité, du conflit sur la vie des Coréens.
Car cette division soudaine du pays a aussi fait séparer des milliers de familles coréennes. Des pères et des mères qui n’ont plus revu leurs enfants, du jour au lendemain, partis ou restés de l’autre côté de cette frontière devenue imperméable.
Le car nous arrête pour un premier arrêt au parc Imjin Gak. Bien qu’assez touristique, il propose un ensemble de monuments poignants dédiés à la mémoire de la guerre de Corée. Parmi eux, on peut notamment voir un grillage de barbelés sur lequel des familles coréennes ont placé des rubans colorés, porteurs de messages en hommage à des êtres perdus de vue.
C’est là aussi qu’on peut apercevoir le Pont de la Liberté, un pont ferroviaire aujourd’hui barricadé mais qui a autrefois été emprunté par des prisonniers de guerre sud-coréens et américains qui recouvraient leur liberté vers le sud, d’où son nom.
À l’intérieur de la zone démilitarisée
D’autres lieux témoignent de la volonté du peuple coréen de poursuivre l’histoire millénaire qu’ils ont déjà forgée ensemble, en étant à nouveau réunis.
À quelques centaines de mètres de la DMZ, la gare de Dorasan se situe sur le tracé d’une ancienne ligne ferroviaire qui traversait jusqu’en 1945 les deux Corées. Au début des années 2000, dans la perspective d’un rapprochement entre les deux pays, la gare fût rénovée.
Si elle n’accueille aujourd’hui que quelques trains par jour à peine, tous en provenance de Séoul et sans continuer plus au nord, la gare apparaît aujourd’hui comme un symbole de cette Corée prête à se réconcilier avec elle-même.
Après avoir traversé le checkpoint militaire qui permet de pénétrer à proprement dit dans l’enceinte de la DMZ, un prochain arrêt nous mène sur les lieux du Troisième tunnel d’infiltration.
Il s’agit de l’un des quatre tunnels creusés par la Corée du Nord sous le 38e parallèle et découverts, celui-ci en 1978. Ces tunnels auraient été creusés dans le but d’envahir la Corée du Sud (30 000 hommes par heure auraient pu les emprunter, semble-t-il !), même si le Nord prétend qu’il ne s’agit que de vestiges d’anciennes mines de charbon. Une vingtaine d’autres tunnels de ce genre resterait encore à découvrir.
Juste en face de l’entrée du musée, qui permet de visiter ce tunnel aujourd’hui soigneusement cloisonné et étroitement surveillé, figure un autre monument pro-réunification intitulé Cette Seule Terre. On peut y voir un globe coupé en deux, mais dont deux groupes d’hommes, de femmes et d’enfants tentent de recoller les morceaux.
Ce jour-là, il n’avait pas été possible de rejoindre la Joint Security Area (JSA), sous contrôle onusien et qui marque la frontière exacte entre les deux Corées. La volonté de réunification n’empêche pas quelques montées sporadiques de tensions entre les deux pays.
Informations pratiques
- La DMZ se situe à une quarantaine de kilomètres de Séoul. Pour y accéder, il faut impérativement passer par des tours organisés, il n’est pas possible de s’y rendre seul.
- Plusieurs types de tours sont proposés, avec notamment en option le passage au niveau de la JSA. Compter d’une demie-journée à une journée complète pour la visite.
- La zone reste une zone de conflit, et les tensions peuvent monter d’un cran sans prévenir. Du jour au lendemain, l’accès à la JSA voire à la DMZ peut être restreint. Prévoyez un plan B dans votre agenda au cas où !
Cet article a été rédigé sur la base d’un voyage effectué en novembre 2015.
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